Histoire

Au Mali, Adama s’accroche à son éducation

À l’âge de 11 ans, Adama Barry devrait être en deuxième année d’enseignement primaire, mais elle ne va plus à l’école en raison de la pandémie de COVID-19.

Portrait d’Adama

En 2017, Adama et sa famille ont dû quitter leur ville d’origine pour fuir un conflit intercommunautaire opposant deux groupes ethniques, les Peuls et les Dogons, dans la région de Mopti (centre du Mali), qui est fortement touchée par la violence et la guerre. Avec sa famille, elle vit dans un camp de réfugiés en périphérie de Bamako.

En plus des problèmes de sécurité auxquels il fait face, le Mali est confronté à la pauvreté, à un accès limité aux services de base, ainsi qu’à des normes culturelles et des pratiques sociales qui font obstacle au progrès des femmes, en particulier dans le domaine de l’éducation. Plus de la moitié des jeunes Maliens âgés de 15 à 24 ans sont analphabètes et, d’après les statistiques nationales, 53 % des filles sont mariées avant l’âge de 18 ans.

Adama a pu retourner à l’école en 2018 grâce à l’action conjointe menée par l’UNESCO, le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et ONU-Femmes pour réintégrer les enfants déplacés à l’intérieur de leur propre pays dans le système scolaire formel de Bamako. Ce travail s’est accompagné d’un soutien financier à l’achat de fournitures scolaires (cartables, cahiers, uniformes, livres) destinées aux enfants comme Adama, pour favoriser la fréquentation scolaire.

À l’école, Adama a appris à lire et écrire en français ainsi qu’à parler le bambara, la langue locale utilisée à Bamako, et s’est même fait de nouveaux amis. « J’aime apprendre », explique-t-elle. « Ma langue maternelle est le fulfulde, mais je parle aussi le bambara. J’ai appris cette langue avec mes camarades, à l’école »

Conséquences de la COVID-19 sur l’éducation des filles

Alors qu’Adama retrouvait une vie plus normale, même en habitant dans un camp de réfugiés, l’épidémie de COVID-19 est venue interrompre une fois de plus son apprentissage. En mars 2020, tous les établissements d’enseignement du Mali ont fermé leurs portes jusqu’à la mi-septembre afin de limiter la propagation du virus. Comme Adama, plus de 1,7 million de filles et de jeunes femmes ont été déscolarisées dans le pays au plus fort de la pandémie, et 2 millions d’enfants n’ont pas eu accès à des possibilités d’apprentissage de substitution.

« Je suis triste de ne plus apprendre Â», déclare Adama. « Maintenant, tous les jours, je pars chercher du bois autour du camp avec d’autres enfants pour faire la cuisine. Â» Dans le camp, Adama n’a pas accès à Internet et ne peut donc pas poursuivre son apprentissage à distance, et son école ne fournit pour l’instant aucune aide à cet égard. À la place, elle accomplit des tâches domestiques.

Les filles qui vivent dans des camps de réfugiés, comme Adama, sont plus vulnérables, car leur situation vient aggraver les obstacles à l’éducation. Les risques comprennent notamment la demande de soins aux autres membres de la famille, des taux accrus de violence liée au genre, de mariages précoces et forcés et de grossesses non désirées, ainsi que l’aggravation de la fracture numérique entre les genres.

Cependant, Adama ne perd pas espoir. « Je lis souvent mes livres et mes cahiers pour continuer d’apprendre Â», dit-elle.

La mobilisation des parents est essentielle

« Une personne éduquée a plus d’importance qu’une personne analphabète Â», affirme Aminata Traore, la mère d’Adama. « Je veux qu’elle aille à l’école et qu’elle ait un bon travail une fois qu’elle aura terminé ses études. Â»

Aminata est fière que sa fille ait pu s’intégrer à Bamako, apprendre la langue locale et commencer à comprendre et parler le français. Elle a conscience de l’importance de l’éducation et de l’alphabétisation pour l’avenir de sa fille.

Aminata espère que les enseignants aideront Adama à poursuivre son apprentissage malgré la situation sanitaire. « Lorsque l’école reprendra, je l’aiderai à retourner en classe Â», déclare-t-elle. « Je trouverai un moyen d’acheter des fournitures pour qu’elle poursuive sa scolarité. Je ne veux pas qu’elle arrête l’école. Â»

Pendant la crise de la COVID-19, le a apporté un soutien technique au gouvernement du Mali pour organiser et diffuser sur la chaîne de télévision nationale des cours de rattrapage destinés aux apprenants. Des messages de sensibilisation ont également été diffusés au sein des communautés, afin d’inciter les parents à soulager les filles des tâches domestiques pour qu’elles puissent assister aux cours de rattrapage retransmis à la radio et à la télévision, et de faciliter le signalement des violences liées au genre grâce à un numéro vert.

Adama a repris le chemin de l’école depuis le mois de septembre, à la réouverture de son établissement. Elle demande aux dirigeants de faire tout leur possible pour mettre fin à la guerre, afin qu’elle et sa famille puissent rentrer chez eux, et pour permettre aux filles comme elle de poursuivre leur scolarité.

L’UNESCO et les partenaires de la Coalition mondiale pour l’éducation ont récemment visant à garantir que chaque fille puisse apprendre pendant que les écoles sont fermées et retourner en classe en toute sécurité lorsqu’elles rouvriront.