Au cœur de la vallée de la Békaa, dans les écoles de l’UNESCO, les jeunes réfugiés syriens ne suivent pas que des cours traditionnels. Depuis plus d’un an, ils s’adonnent à un nouveau genre d’activités, la création d’histoires sous forme de bandes dessinées. Un projet qui mêle l’utile à l’agréable.
« Le but est de développer les capacités de ces jeunes pour le futur, explique Dr. Hisham Ramadan, ingénieur qui dirige le projet. Nous parlons de capacités digitales mais également de compétences plus générales comme le travail de groupe, la communication, l’écriture, la lecture, et la pensée créatrice, le tout à travers une méthode innovatrice. Il s’agit également d’atteindre les Objectifs de développement durable des Nations-Unis et de préparer la jeunesse pour les défis du 21ème siècle. Comme l’ODD3 pour une vie saine et le bien-être, l’ODD4 pour l’éducation de qualité, l’ODD5 pour l’égalité des sexes, et bien d’autres ».
Financé par le Centre Roi Salman pour l'aide humanitaire et les secours, et en partenariat avec la Fondation Kayany, ce programme s’inscrit dans le cadre du projet de l’UNESCO « Soutenir l'achèvement de l'éducation de base pour les réfugiés syriens au Liban », initié en 2018, et qui offre à plus de 8200 étudiants syriens des programmes de soutien éducatif et psychologique, et favorise un environnement éducatif qui stimule l'apprentissage grâce à un appui offert à 600 enseignants.
Jusque-là , plus de 70 élèves âgés entre 14 et 15 ans ont pris part au programme de bandes dessinées et produit 7 histoires, lors d’un processus en 4 étapes : l’élaboration de l’idée et l’écriture de l’histoire, la transformation en dessins, la numérisation, et la finalisation des modèles sur ordinateur. « C’est de manière indirecte qu’ils apprennent à utiliser les outils digitaux, ajoute Dr. Ramadan. A aucun moment, nous leur disons que nous allons appendre à utiliser un logiciel ou un matériel informatique. Et il est satisfaisant de voir que les élèves progressent et ne s’ennuient pas. Au contraire, ils sont plus enthousiastes les uns que les autres à l’idée de s’entraider et de collaborer ensemble. »
« C’était une expérience plus qu’exceptionnelle, confie sur ce plan un participant. J’ai appris de nombreuses informations sur l’usage de logiciels, et sur la manière d’écrire une histoire réussie, du choix du sujet jusqu’au design ». « Merci pour ce projet auquel je suis vraiment heureuse de prendre part, ajoute pour sa part une jeune étudiante. J’ai acquis de nouvelles capacités, et j’espère pouvoir réitérer cette expérience dans les jours à venir. »
Si les participants ont le choix d’écrire l’histoire qu’ils veulent en laissant libre cours à leur imagination, Hicham Ramadan assure qu’ils ont surtout envie de raconter des histoires inspirées de leur vécu ou de leur expérience personnelle. « C’est l’aspect psychothérapeutique du projet, car ces enfants livrent leurs peurs et leurs sentiments dans ces bandes dessinées, et s’expriment à travers leurs protagonistes », explique l’expert.
Sur ce plan, il affirme que certains thèmes sont récurrents dans les histoires, comme la peur ou la perte d’un être cher. « Nombre de ces histoires est lié à l’insécurité, dit-il. Comme celles qui racontent l’absence d’un père ou les problèmes d’un père qui ne peut pas subvenir aux besoins de sa famille. On retrouve également des personnages comme des héros ou des sauveurs qui viennent sauver la situation par miracle, parfois même en ayant recours à la magie. Avec les enseignants, nous modérons ces éléments en expliquant que cela n’arrive pas souvent dans la vraie vie, tout en essayant de ne pas nous retrouver avec des histoires trop malheureuses. Ces histoires restent, en quelque sorte, une évasion pour ces enfants de leur quotidien… »