Pendant ce Campus UNESCO, plus de 150 élèves se sont réunis pour échanger avec deux experts sur les défis du vivre-ensemble en ligne et la construction d'une citoyenneté numérique consciente, critique et éthique.
À une époque où les réseaux sociaux et les outils numériques font partie du quotidien des jeunes, il est essentiel d’apprendre à interagir en ligne de manière respectueuse et responsable. Ce Campus a permis aux élèves de réfléchir ensemble aux bons usages du numérique et à ce que signifie être un citoyen du monde connecté.
Cet évènement a rassemblé les élèves du Lycée ¹ó°ù²¹²Ôç²¹¾±²õ Blaise Pascal à Lubumbashi en République Démocratique du Congo, du Lycée Montaigne à Beit Chabeb au Liban, du Collège de l'ÃŽle Rousse à L'ÃŽle-Rousse en France, du Collège National Tudor Vladimirescu à °Õâ°ù²µ³Ü Jiu en Roumanie et du Lycée µþ±ð°ù³Ùè²Ô±ð Juminer au Lamentin en Guadeloupe. Ensemble, ils ont exploré les enjeux liés à la citoyenneté numérique et réfléchi aux actions concrètes afin de promouvoir un environnement en ligne respectueux et inclusif.
Adeline Hulin, Cheffe d’unité pour l’éducation aux médias et les compétences digitales à l’UNESCO, a ouvert la discussion en expliquant la manière dont les jeunes s’informent aujourd’hui. Une récente étude de l’ARCOM révèle que les 15–24 ans passent en moyenne 5h21 par jour devant des vidéos, principalement sur les réseaux sociaux, la télévision et les plateformes à la demande. Si les jeunes continuent de s’informer, leurs pratiques ont profondément évolué : ils privilégient les formats courts, les infographies ou encore les stories, produits par des créateurs de contenus qui s’expriment comme eux. 55 % des utilisateurs de TikTok déclarent s’informer via des influenceurs. Pourtant deux tiers d’entre eux ne vérifient pas leurs sources et se fient au nombre de likes.
Le danger réside pourtant dans la circulation active et rapide des fausses informations et des discours de haine.
Les mensonges et les fausses informations circulent 7 fois plus vite que la vérité, les jeunes doivent apprendre à développer leur esprit critique pour mieux faire le tri sur les réseaux sociaux.
Curieux et engagés, les élèves ont ensuite pris la parole pour interroger l’experte sur les enjeux concrets qu’ils rencontrent au quotidien en ligne.
Les réseaux sociaux rapprochent-ils vraiment les gens, ou créent-ils plus de divisions ? Pour Adeline Hulin, la réponse n’est pas simple. Les plateformes peuvent à la fois nourrir des élans de solidarité mondiale et amplifier des tensions en favorisant la diffusion de contenus haineux ou complotistes.
Conçus pour capter notre attention, les algorithmes mettent en avant les contenus qui suscitent des émotions fortes, comme la peur ou la colère, car ce sont ceux qui engagent le plus.
Résultat : Les éléments négatifs se propagent plus vite, et les conflits en ligne peuvent avoir de réelles conséquences dans le monde physique.
Dans cet environnement saturé d’informations, il devient difficile de distinguer le vrai du faux. Les jeunes doivent donc apprendre à reconnaître des sources fiables, comprendre comment les contenus sont produits, et connaître la différence entre un journaliste (qui vérifie, source, et contextualise) et un influenceur, dont les objectifs peuvent être différents. Pour cela, l’éducation aux médias est essentielle. Enfin, chacun peut aussi agir concrètement : en signalant les discours de haine, en questionnant ce qu’il lit, et en développant une utilisation plus responsable et consciente des réseaux.
Pour approfondir ces enjeux, il est essentiel de comprendre le rôle des algorithmes qui structurent notre flux d’informations.
Marc-Alexandre Ladouceur, , nous plonge au cœur des mécanismes qui façonnent notre expérience numérique. *Un algorithme fonctionne comme une série d’instructions, un peu à l’image d’une recette, qui trie, classe, jumelle et filtre les données. Dans l’univers des réseaux sociaux, ces algorithmes analysent nos comportements pour nous proposer du contenu personnalisé, en se basant sur ce qui semble le plus susceptible de nous intéresser.
Ces systèmes recueillent des données de manière explicite, par nos recherches et nos interactions, et implicite, en observant nos habitudes en ligne. L’objectif des plateformes est de maximiser le temps passé par les utilisateurs, que ce soit par la vente de données ou via des partenariats publicitaires. Ainsi, des informations comme la géolocalisation ou d’autres critères permettent de proposer un contenu taillé sur mesure, tout en posant d’importantes questions sur la protection de nos données personnelles.
Tout ce que nous publions devient la propriété des plateformes numériques, reste en ligne et façonne un CV numérique qui ne reflète pas toujours notre réalité.
Face à ces enjeux, il est crucial pour chaque citoyen numérique d’adopter des pratiques responsables. Marc-Alexandre Ladouceur préconise, par exemple, l’utilisation d’outils comme les VPN et une gestion rigoureuse des paramètres de confidentialité, tout en soulignant l’importance de comprendre les conditions d’utilisation pour savoir exactement ce que nous partageons en ligne. L’objectif est de développer une citoyenneté numérique éclairée, où chacun peut naviguer dans l’univers digital avec discernement et responsabilité.
Lors de la session de questions, les élèves se sont penchés sur des points essentiels. Ils se sont interrogés, par exemple, sur le fait que les applications gratuites recueillent nos données pour proposer des publicités ciblées et générer des profits, souvent au détriment des protections légales. La littératie numérique a également été évoquée : comprendre ce que nous partageons, comment nos données sont utilisées et quel rôle nous pouvons jouer dans l’écosystème numérique est devenu crucial. Cette réflexion fait écho à la nécessité de renforcer les protections, en particulier pour les populations vulnérables, et de promouvoir des comportements numériques plus éthiques et informés.
Certains élèves ont aussi soulevé la question du droit de regard sur les algorithmes, ces « boîtes noires » dont le fonctionnement reste inaccessible, car détenu par ceux qui les conçoivent. On ne peut en observer que les résultats, sans jamais savoir précisément comment ils sont produits. Une opacité qui soulève des enjeux fondamentaux : comment exercer un esprit critique face à des mécanismes que l’on ne peut ni comprendre, ni interroger ?
Cet évènement s'inscrit pleinement dans le mandat de l'UNESCO de promouvoir une éducation inclusive pour tous, notamment dans le domaine numérique. Il a permis de rappeler l’importance d’une utilisation consciente et responsable des technologies dans un monde de plus en plus connecté.
Chacun de nous a un rôle à jouer en s’éduquant, en cultivant un esprit critique et en adoptant des comportements responsables, afin de contribuer à la création d'un espace numérique plus respectueux, éthique et sain pour tous.
Ce Campus a été rendu possible grâce au soutien de TECH4ALL et la collaboration de 6C Conseil.